Cela se déplace. Cela ne se déplace pas
C’est loin, et c’est proche
C’ est à l’intérieur de tout ceci
Et, c’est en dehors.

Upanishads

L’univers est plat! Viennent de proclamer récemment les scientifiques et astronomes. Si c’est le cas, nous devrions tous être capable de tomber facilement du bord et en même temps nous savons que nous ne pouvons pas. Le soleil, source de vie apportant chaleur et lumière, est un astre autour duquel la terre, ainsi que d’autres palnètes, tournent. Cela a été le principe directeur de clareté et d’objectivité. La lune d’un autre côté a, siècle après siècle, inspiré poètes, peintres et musiciens. Elle a une relation symbiotique avec la terre étant en orbite par la force gravitationnelle de la nature. Elle ne produit pas de lumière mais reflète celle du soleil. C’est le principe inhérent au romantisme, à l’ idéalisme et à la subjectivité. Entre ces deux idées, se trouve la terre qui est la fondation de l’installation de lumière de Nathalie Junod Ponsard. Cosmic geometry est une étude du monde comme il est vécu et expérimenté par les humains plutôt que du monde subjectif, abstrait et conceptualisé.
Edmund Husserl, philosophe allemand, a contribué à développer cette philosophie de l’expérience de la Phénoménologie. Il a écrit intensivement sur cette relation entre ce monde matériel de construction mentale et le monde vécu. Il a dit  » Je suis conscient du monde, se déployant dans l’espace sans fin, et dans le temps se déployant à l’infini. Je suis conscient de cela, ce qui signifie avant tout , que je le découvre immédiatement, intuitivement, je l’expérimente. Grâce à la vue, au toucher, à l’ouïe, etc., par les différentes voies des perceptions sensorielles, les choses materielles quelles que soient leurs distributions spatiales, sont pour moi simplement là, au sens littéral ou au sens figuré, « présentes », que je leur prête ou non attention en m’occupant d’elles, les considérant, les pensant, les sentant, les acceptant « (1).Le problème fondamental est le développement et l’état de la conscience humaine. Les oeuvres d’art servent d’intermédiaire entre la conscience du créateur et celle de celui qui regarde. Le philosophe français, Maurice Merleau Ponty poursuivit ceci dans son traité méconnu « Phénoménologie de la Perception », affirmant que l’expérience vécue est pleine d’ambiguité et que la conscience humaine pourrait être située dans le corps physique et ses sens (2). Et alors, qu’elle est notre perception du soleil/lune et, dans ce sens, sa relation tangentielle à l’être humain?

Cosmic Geometry est située à l’intérieur d’un cadre phénoménologique et du minimalisme qui s’éloigne d’un désordre d’images représentationnelles pour simplifier l’art à son support essentiel, et dans certains cas aux rudiments de l’abstraction géométrique nichée sur un continuum espace-temps. Suivant les traces des artistes Barnett Newman et John Cage, l’installation de Ponsard est caractérisée par la prédominance formelle des volumes qui les dote d’une haute abstraction de composition. Le soleil/lune est réduit à une géométrique spartiate modérée mettant en valeur les connections non communes et conflictuelles entre elles. Son insistance nullement décontenancée avec ce minimalisme rend cette oeuvre agréablement esthétique. L’oeuvre se développe avec ses ambiguités, indetermination et ouverture pour des interprétations formelles et informelles. Cela peut-être la plus importante force de libération car elle invite le visiteur à ouvrir son esprit pour s’emerveiller, voyager. Le désordre de l’ère de l’information est éxilé dans la clarification du champ de perception.

L’utilisation de l’espace-temps est étirée sur notre carte perceptuelle de la réalité . Le concept occidental d’espace-temps remonte à la pensée grecque qui voyait la géométrie essentiellement à l’état de nature plutôt que comme une construction de l’esprit. La philosophie orientale, d’autre part , maintient que l’espace-temps est essentiellement une construction mentale – relative, limitée et illusoire (3). Ponsard entreprend de jouer avec la seconde en dé-construisant l’espace de la galerie/univers et les notions prédestinées du soleil et de la lune en permettant au public de regarder Cosmic Geometry comme une oeuvre ouverte 
pour un esprit ouvert. A l’intérieur se trouve sa critique des perceptions existantes du monde cosmique.

En établissant l’idée du soleil à l’intérieur d’une boite jaune, et de la lune dans une lumière blanche lumineuse, Ponsard transforme les deux constellations en artefacts, simplement en les isolant de leur contexte, celui de l’univers. L’entre-deux c’est la terre. Le public devient ce que Merleau-Ponty appelle « cet anonyme perdu dans le monde qui n’a pas tracé son chemin ». Le désir du public de contrer sa présence dans la pièce est aussi ce qui l’empêche de le faire si complètement. D’abord, le visiteur est tiré entre la liberté de marcher en dehors de l’espace ou de se soumettre aux deux constellations. L’oeil ne peut jamais se voir en train de regarder parce qu’au point central à partir duquel les champs perceptuels irradient, le visiteur demeure nul et non avenu. Ce dernier est transposé immédiatement de la centralité perceptuelle de la terre galerie/univers, en un sens, aux marges et notes, de la galerie/univers. Ponsard transforme la fonctionnalité de la relation du soleil-lune-terre en une relation dysfonctionnelle.

La lumière sert à illuminer les volumes géométriques de l’intérieur. Ils sont constitués d’une substance visuelle qui est faite de plexiglass translucide qui engendre des reflets sur le sol de la galerie. L’illumination de l’intérieur devient le palais des couleurs et casse la dialectique du soleil et de la lune. Les formes procurent le drame visuel en prenant le rôle d’absolus et attirent une grande attention visuelle pour 
elles-mêmes. Pendant qu’ils illuminent, les volumes géométriques sont sous les feux. La dialectique de la lumière/obscurité est jouée et rejouée dans l’esprit du public, non pas dans la galerie.La pièce spectrale devient l’élément intégral dans cette installation.

Aussi, où va l’oeil du visiteur? Est-il libre de s’emerveiller, essaiera-t’il de chercher la force « artistique » de l’ensemble du projet ou sera-t’il défié à chercher le point d’interêt ou bien un endroit confortable pour permettre, à son esprit, de formuler une perception, une opinion. Egalement, où va le corps physique du visiteur? Se deplacera-t’il librement ou essaiera-t’il énergiquement de chercher l’endroit le moins éclairé, l’espace le moins lumineux pour se placer?
L’instabilité est importante pour le public pour l’accepter et l’intégrer dans sa sensibilité. L’ « ouverture » de l’oeuvre nous donne une image de discontinuité. Elle n’est pas narrative ou complète. Umberto Eco, dans son livre L’Oeuvre Ouverte dit que l’art « prend un rôle médiatique entre les catégories abstraites de la science et la matière vivante de notre sensibilité; il devient presque une sorte de plan transcendental qui nous permet d’appréhender de nouveaux aspects du monde »(4). La Géométrie Cosmique de Ponsard fait exactement ça.
(Traduit de l’anglais)

Venka PURUSHOTHAMAN

Critique et théoricien d’art. Professeur à l’Ecole Supérieure d’Art Lasalle-Sia, Singapour.


!- Edmund Husserl. Idées: Introduction à la Phénoménologie Pure. New York : Macmillan. 1962
2- Merleau-Ponty Maurice Phénoménologie de la Perception. New York : Routledge. 1989
3- Fritjof Capra. Le Tao des Physiques.Londres : Haraper Collins publishers. 1976
4- Umberto Eco. L’Oeuvre Ouverte. Harvard University Press. 1989